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8-4 Un monopole partagé avec les surveillants pénitentiaires dans le suivi des PSE

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Depuis début 2010, environ 35 agents du personnel de surveillance, en charge du PSE, ne sont plus rattachés à une maison d’arrêt mais à un SPIP. Ce transfert géographique vise à réunir la gestion socio-éducative et la gestion technique du PSE en un même endroit. Cette expérimentation (« surveillant chargé du PSE en SPIP ») est partie intégrante d’une expérimentation plus large, celle de la segmentation.

Dans les 11 sites concernés, le modèle du cabinet croissance(44) prévoit une réorganisation du SPIP en 5 « segments », et un transfert d’une partie des suivis vers le personnel de surveillance.

Chaque Direction Interégionale, ainsi que la Mission Outre-mer, fonctionne à présent avec un pôle centralisateur 24h/24. Seize postes ont été créés à cette fin à la DAP qui estime qu’un pôle centralisateur peut fonctionner avec 8 agents.

De plus, 46 postes PSE ont été ouverts dans les SPIP en 2010. En plus des 55 SPIP qui seront donc concernés cette année, le reste des services devrait être pourvu en 2011.

La DAP annonce que chacun de ces postes fera l’objet d’une compensation pour les établissements. Les agents déjà en charge du PSE seront prioritaires pour ces postes. Cette cohabitation récente des CPIP et des surveillants PSE en milieu ouvert dans la mise en oeuvre d’une même mesure, le placement sous surveillance électronique, tend à rapprocher progressivement les SPIP des établissements pénitentiaires :

Ainsi, progressivement, les SPIP tendent à devenir des établissements pénitentiaires, même si l’installation de greffes au sein des SPIP n’est pas actée actuellement. Cela confirme que les métiers de CPIP et de surveillants sont destinés à se compléter et à s’articuler de manière plus formalisée :

F, 49 ans, Assistante de service social, 28 ans d’ancienneté

: « Globalement, l’AP a mis la main sur ses agents, on peut le dire, et puis la culture pénitentiaire, celle qu’on trouvait dans les prisons, s’impose dans le milieu ouvert, avec, par exemple, la question de la sécurité qui était évidement présente en prison ; c’est éminemment culturel, en milieu ouvert ça n’existait pas, je persiste à dire qu’il y a peu de problèmes, les problèmes de sécurité sont extrêmement rares ; au fil des années, à partir de fait divers, on a construit l’objet insécurité dans les services »

F, 46 ans, Assistante de service social, 22 ans d’ancienneté

: « Moi, je parlerai de pression, moi, je sens plus la pression pénitentiaire ; moi, ce qui me parait le plus proche de moi, c’est le champs pénitentiaire, même si je ne travaille pas en milieu fermé, parce que du fait de la réforme de la départementalisation, il y a quand même une administration pénitentiaire qu’on sent plus proche, et la direction régionale, les modifications, enfin, les réformes ; ensuite, le champs judiciaire me semble s’être éloigné de moi, puisque c’est vrai que pendant longtemps, j’ai travaillé au tribunal, c’est vrai que par exemple, à une époque, je connaissais tous les magistrats, les greffiers, donc, pour moi le champs judiciaire s’est un peu éloigné pour que se rapproche le champs pénitentiaire ; le champ social s’est éloigné aussi, autant il y avait une forme avant, autant aujourd’hui, j’ai l’impression que les formes du champs social sont en train de devenir de plus en plus floues, parce qu’en fait, on a pas le temps de faire vraiment un travail social correct ».

Cette nouvelle complémentarité/compétition entre surveillants et CPIP mériterait une étude spécifique, avec un peu plus de recul sur la mise en oeuvre de cette réforme dans la perspective de « l’écologie des professions », initiée par Abbott. Cet auteur accorde aux conflits de juridiction, survenant entre professions sur un même lieu de travail, une place centrale.

Toute profession est en lutte pour « la maîtrise de territoires ou de domaines réservés (juridictions) au sein de la division du travail » [ABBOT, 1988]. Il nous semble que les interactions entre surveillants, affectés dans les SPIP et CPIP, sont de nature à se compléter mais aussi à se concurrencer sur des dimensions comme le rendu compte des incidents ou le suivi administratif des mesures à déléguer à l’un ou à l’autre de ces groupes professionnels.

Cette congruence des missions entre CPIP et surveillants dans les fonctions administratives de surveillance est partiellement actée par le nouveau projet d’organisation de service des SPIP qui suggère un suivi administratif des personnes placées sous main de justice ne présentant pas de dangerosité et ne nécessitant pas d’intervention du SPIP en matière d’orientation vers des partenaires extérieurs par les surveillants pénitentiaires.

Ainsi, de la proposition d’un placement sous surveillance électronique aux Juges d’Application des Peines à l’instruction et au suivi de cette mesure, les CPIP mobilisent des savoirs d’action non formalisés. Une systématisation de la surveillance électronique tend cependant à réduire leur autonomie d’analyse de la situation des personnes placées sous main de justice.

En parallèle, les CPIP redécouvrent l’analyse collégiale des situations prises en charge par les services avec la pratique très récente à l’échelle de tous les services des programmes de prévention de la récidive. Leur formation initiale n’intégrant cette mesure que depuis 2009, elle ne peut constituer en l’état une pratique centrale fondant l’identité de ce groupe professionnel. Les visites à domicile se raréfiant, de nouvelles professionnalités émergent entre surveillance, technicité juridique et connaissances spécifiques sur les infractions commises par les publics.

44 Voir Annexe 7 p184

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