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3.3.4-Le web-documentaire est-il au cœur d’une expérience collective ?

Non classé

Dès lors quel est l’impact du web-documentaire sur le collectif ? Les moyens possibles permettant de répondre à cette interrogation sont quelque peu limités. Un de ces moyens est de tenir compte des réactions des internautes. Le site lemonde.fr permet à ses abonnés de réagir à propos des articles et des web-documentaires. Nous avons sélectionné et classé ces commentaires. Y a-t-il discussion autour des web-documentaires ?

« L’émergence de l’exposition est liée à un changement d’opérativité sociale des productions picturales imagées (décors peints, tableaux) : celles-ci quittent la sphère du pouvoir pour entrer dans le domaine privé. Dans cette perspective, elles ne seraient plus moyen de manifestation d’une autorité transcendante fondant et légitimant le pouvoir politique, mais deviendraient des œuvres au sens moderne du terme, comme un objet apprécié pour lui-même et, en même temps, un objet de discussion et de jugement de la part d’amateurs éclairés constituant en public »(146).

Ces propos de Jean Davallon sont adaptés au phénomène du web-documentaire. Dès lors, peut il devenir objet de discussion ? Nous avons analysé l’ensemble des commentaires qui suivaient les productions web-documentaires historique du site lemonde.fr. Les commentaires ont été réparti et trié selon 7 types : l’intervention du médiateur, la remarque personnelle qui ne nourrit pas le débat, la critique (soit du dispositif soit de la manière dont l’information est traitée et livrée), le discours polémique souvent véhément, des commentaires sources de véritable débat, les éloges du webdocumentaire, et d’autres remarques qui n’ont pas grand intérêt.

Remarques élogieuses

Sur l’ensemble des commentaires, la grande majorité sont des remarques élogieuses sur le webdocumentaire en question. Nous pouvons citer à titre d’exemple le commentaire de CD – à propos du webdoc Indépendance Chacha – : « Enfin un document multimédia de qualité, une forme qui devrait être plus présente sur internet ». Ce genre de commentaire élogieux est assez rare car peu d’éloge engage une réflexion sur le format et la diffusion du web-documentaire. La majorité de ce type de commentaire est du genre de celui de Marie-Sophie à propos de Berlon 1989, souvenirs d’un monde d’hier : « Excellent multimédia interactif ». A contrario, près d’un tiers constitue des critiques à l’encontre du web-documentaire. Nous avons constaté que trois types de critiques sont adressés : à propos de l’orthographe, de la manière dont est traité le sujet et par rapport au dispositif technique. Par exemple, Bibi Fricotin regrette que « cette interface [le webdoc sur François Duprat] soit inutilement sophistiquée et mal commode ». L’autre constat de notre analyse est l’absence de véritable débat. Il y a très peu de réponse à un commentaire. Parfois, deux ou trois individus se répondent mais ce phénomène est rare. Lorsqu’il existe, la polémique en est la source. Le terme ”débat” dans notre classification fait référence à un certain idéal du discours et de l’échange humain.

Nous distinguons la critique du débat dans le sens où la critique est un constat sur un point précis. Il n’appelle à aucune réaction particulière. La différence entre le débat et la polémique réside dans l’intention de cette seconde à choquer pour inciter d’autres à répondre. La virulence de certains propos exclut toute forme de discussion. La plupart de ce genre de commentaires se retrouvent à la suite de web-documentaires historiques qui traitent de sujets sensibles notamment la guerre d’Algérie. Le web-documentaire sur les tortures perpétrées en Algérie a réuni plus de 20 commentaires ”polémique” sur les 35 publiés. Parmi ces remarques, un individu s’étonne : « Pourquoi vouloir ajouter du chaos au chaos. Vous croyez que nous n’avons pas assez de problèmes actuels pour invoquer ceux du passé ? Devoir de mémoire ? Ou volonté morbide d’ajouter aux temps troublés d’aujourd’hui, les malheurs du temps passé ? ». Dans ce genre de commentaire, il s’agit d’une logique de confrontation et d’émotion. Cette logique est incompatible avec toute notion de débat et de discussion.

L’expérience collective du web-documentaire historique est donc à relativiser. La mémoire collective se construit certes à travers l’Histoire et les imaginaires mas la notion de dialogue est également essentielle. Le dialogue ne nait pas autour de ces web-documentaires historiques. Cela est visible également sur les réseaux sociaux où les pages consacrées à ces web-documentaires (notamment les pages facebook d’Adieu Camarades et des Combattants de l’ombre)(147) sont peu commentées et peu suivies. Or la connaissance doit circuler, faire tâche d’huile pour imprégner la société. Pour le moment, le web-documentaire historique ne parvient pas générer des débats de grande ampleur. Toutefois, nous devons rappeler qu’il s’agit d’un genre médiatique émergent.

146 DAVALLON, Jean, Le musée est-il vraiment un média ? op.cit.
147 Annexes 26 et 27

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