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2.4. Les Conflits armés en Afrique, expression de la guerre froide.

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2.4.1. Les conflits intra étatiques

Avec plus de cinquante millions de morts et des dégâts matériels considérables, le monde sort meurtri des effets de la seconde guerre mondiale. Affaibli, et pour des raisons idéologiques et politiques, il va se répartir en deux blocs. Le bloc socialiste que défend l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS), le monde capitaliste que prône les Etats Unis d’Amérique (EUA) et ses alliés d’Europe de l’Ouest.

On constate que les deux alliés qui se sont soutenus pendant le déroulement de la grande guerre, voient leur lien se détériorer. La conférence de Yalta(55) qui est censée normaliser le cadre de gestion démocratique de ce nouveau monde, n’a donné que l’occasion à des divergences de point de vue entre les deux parties ; Moscou décide d’imposer le système socialiste dans les territoires conquis, les autorités américaines dénoncent une « politique totalitaire ».

Des crises politico-militaires vont se succéder en Europe et en Asie. La Corée divisée en deux (Nord, Sud) après le départ des Japonais va devenir de 1950 à 1953, le théâtre de confrontation indirecte entre les deux puissances qui renforce chacun sa position ; les soviétiques soutiennent le nord tandis que les américains apportent leur appui au sud.

Par ailleurs, la guerre d’Indochine de 1946 à 1954, traduit l’inquiétude de l’Ouest face à l’idéologie de l’Est(56). Des alliances à visé stratégique vont se multiplier dans le bloc de l’ouest, telle l’Alliance défensive du Benelux de mars 1948, la création de l’OTAN en 1949. En guise de riposte, le bloc de l’est signe le Pacte de Varsovie de 1955 et la mise au point des bombes atomique et à hydrogène.

Au côté des manœuvres politico-militaires, notons aussi l’émergence des instruments sur des questions économiques, citons, le plan Marshall(57) annoncé en juin 1945 pour la reconstruction de l’Europe ou l’Organisation Européenne pour la Coopération Economique (OECE) d’avril 1948 destinée à appliquer le plan Marshall.

Craignant l’expansion du champ communiste en Afrique, l’occident va confier aux colonisateurs, la mission d’empêcher l’entrée de cette idéologie sur le continent noir. Dès lors, la guerre froide de l’Europe se transpose en Afrique, pour devenir « guerre chaude » et se déroule à deux niveaux : la guerre froide intra étatique (guerres civiles) et la guerre froide interétatique (guerres des frontières).

Aux guerres idéologiques auxquelles se confrontent les deux puissances, se succèdent sur le contient africain, des guerres ethniques, tribales, de contrôles de ressources naturelles ou encore des guerres de frontières. Chaque puissance développe dans les pays africains, des stratégies afin de défendre ses intérêts ; l’objectif recherché est la main mise sur les appareils de l’Etat, la restriction de la vie politique. Les violences militaires sont autant des pratiques couramment vécues comme des moyens d’action.

Les puissances entretiennent des tensions tribalo-ethniques à l’intérieur des pays, soutiennent ou financent des mouvements sécessionnistes à l’intérieur des territoires, le tout dans une dynamique des coups d’Etat. Qu’ils partent de l’intérieur ou de l’extérieur des pays, les opérations de déstabilisation des régimes s’effectuent par des pays voisins et, les transferts d’armes se multiplient.

Depuis l’ère des temps, le Rwanda du verbe « Kwanda » qui veut dire : « avoir la vocation de s’élargir, d’être grand » (58), est agité par de vieilles tensions ethniques entre Hutu et Tutsi. Ce conflit va se cristalliser avec l’arrivée du colonisateur. Après l’arrivée en vagues successives de Twa, des Hutu et des Tutsi sur ce territoire où ils vont cohabiter avec toutes les difficultés qui s’en suivent. Les Twa premiers occupants, vivant de la chasse et de la culture se constituent un statut particulier, le mettant en marge de l’organisation sociale du territoire. Les Hutu d’origine Bantoue arrivent à leur tour, imposent le nom de Rwanda ; ils mettent en place des organisations administratives du pays, le Rwanda devient une nation regroupant des royaumes indépendants, avec pour vocation la paix.

C’est dans ce contexte que les Tutsi, nomades Hamites, à la poursuite de leurs troupeaux arrivent au Rwanda ; ils sont accueillis par les autochtones hutu qui leur attribuent le nom d’alliance « Kabéja » qui signifie, « laissez les venir ». Entrés par Mubali, les Tutsi vont se fixer à Gasabo sur la rive du lac Muhazi, organisent un modeste territoire à l’instar de l’organisation administrative du pays. De là, ils projettent de conquérir les royaumes Hutu, lesquels doivent dorénavant être exclus de l’exercice du pouvoir. Ce projet de « conquête à la tutsienne »est caractérisé par la mise à disposition des Hutu au service des Tutsi.

A la fin de la première guerre mondiale, le Rwanda est placé sous mandat belge qui promeut une élite tutsi sur laquelle la Belgique va s’appuyer pour gouverner ; à la demande des Tutsi, l’appartenance ethnique est obligatoirement inscrite sur les cartes d’identité car au droit, s’attache la valeur de l’ethnie. D’ailleurs Monseigneur CLASSE a déclaré : « seul le Tutsi qui de par ses qualités supérieures et son sens de commandement était bien indiqué pour gouverner sans partage le Rwanda » (59).

Dans le but de préparer les ressortissants tutsis à mieux gouverner, est né le Groupe Scolaire Astrida, tandis que les Hutu envoient leurs enfants dans les centre catéchistes et écoles artisanales.

A l’issue de la seconde guerre mondiale, un groupe des Hutu formé au séminaire, revendique des droits civiques face auxquels les dirigeants tutsis brandissent des velléités d’autonomie et d’indépendance. Le 23 mars 1957, l’élite hutu publie le « Manifeste bahutu » qui a pour titre : « Note sur l’aspect social du problème racial indigène au Rwanda » ; par cette publication, les hutu dénoncent le monopole des Tutsi sur les structures du pays.

Notons qu’à la veille de la publication du « Manifeste des bahutu », Monseigneur Perraudin et trois autres vicaires apostoliques du Ruanda-Urundi, publient un message sur la justice(60). Dans cette plaidoirie, les auteurs fustigent les abus et injustices pratiqués par les Tutsi. Les religieux se disent reconnaître la légitimité des revendications hutues ; c’est pour eux un moyen de se venger des ambitions de prestige et indépendantistes des Tutsi. En riposte, le représentant tutsi déclare le Conseil Supérieur du Pays (CSP) : «Il en coûtera cher à quiconque s’insurge contre le Rwanda ou cherche sa désunion ». Le durcissement de la position tutsi brise toute possibilité de dialogue et ne fait que radicaliser les revendications hutues.

En 1959 la Belgique autorise la création des partis politiques d’où la naissance des quatre premiers partis du pays sous la supervision du colonel Logiest, résident spécial pour la Belgique.

– L’Aprosoma (Association pour la promotion sociale de la masse) ; influent dans le sud, ce parti a pour principe la rupture politico raciale de la société rwandaise ;
– Le Parme hutu (Parti du mouvement de l’émancipation Hutu), présent dans le centre, prône une monarchie institutionnelle sous tutelle belge pour une période de cinq ans suivi d’un référendum d’indépendance. Ce parti est entièrement soutenu par la Belgique et l’Eglise catholique.
– L’Unar (Union Nationale Rwandaise), parti multiethnique, composé des dirigeants qui optent pour l’authenticité rwandaise dans une démocratie « égalitaire ». Pour ce parti, l’indépendance en 1962 passe par une autonomie en 1960 et relègue au second plan le conflit tutsi-hutu.
– le Rader (Rassemblement Démocratique Rwandais), constitué des libéraux tutsi, est un parti satellite au service de la Belgique pour affaiblir les tutsi radicaux.

Le 1er novembre 1959, un attentat mené par les membres de l’UNAR, parti du roi, contre un sous chef bahutu met le feu au poudre. La révolution culturelle menée par les hutu trouve un motif à son ampleur. Des attaques sont perpétrées systématiquement contre les Tutsi qui réagissent le 03 novembre 1959 suite au décès de deux chefs de leur communauté à Guitarama. Les forces belges interviennent, faisant monter la colère des Tutsi.

Dans la foulée de la révolution, les Hutus demandent l’institution d’un pouvoir hutu en remplacement de celui des Tutsi. Au début de 1960, sous la bannière de l’administration belge, les acteurs de la vie sociopolitique rwandais, assistent impuissants à la démolition de la prépondérance administrative « tutsienne » : suppression des rites royaux, confiscation des biens, transfert des familles tutsies dépossédées dans les zones rurales…C’est le début d’une vague de persécutions contre les tutsi qui s’enfuient vers les pays voisins.

Quand bien même en janvier 1961, le pays prend le nom de la République Démocratique du Rwanda, le plan de l’élimination des Tutsi fait parti du programme politique du gouvernement. La révolution sociale de la période, appuyée par le Colonel belge Guy Logiest occasionne à nouveau des massacres des Tutsi qui s’exilent davantage. Le roi est expulsé par les autorités belges, un gouvernement Hutu est formé, c’est la marche vers l’indépendance en 1962. Comme souligné dans le manifeste bahutu :

« Le problème racial indigène au Rwanda est sans doute d’ordre intérieur, mais qu’est ce qui reste intérieur ou local à l’âge où arrive le monde….! La civilisation qu’apportent les Belges n’aurait réalisé grand-chose, s’il n’était fait des efforts positifs pour lever effectivement ces obstacles à l’émancipation du Rwanda intégral. »(61)

Le 30 juin 1960, le Congo Belge, immense « propriété privée» du Roi Léopold II(62), colonie belge en 1908, accède à l’indépendance. Au lendemain de cette indépendance, le pays entre dans une zone d’instabilité ; à Elisabethville (actuelle Lubumbashi), le 06 juillet 1960, une mutinerie éclate au sein de la force armée sous l’encadrement belge et fait cinq victimes, toutes des européens. Incité par la Belgique, Moise Tshombé en fait un prétexte et proclame l’indépendance de Katanga, le 11 juillet 1960. Patrice Emery Lumumba alors Premier Ministre, Chef du Gouvernement, ne contrôlant plus le pays, rompt les relations diplomatiques avec la Belgique, fait appel aux Nations Unies et aux soviétiques. Le Conseil de Sécurité des Nations Unies vote une résolution demandant à la Belgique de retirer ses troupes qui sont remplacées par les casques bleus des Nations dont la mission initiale est d’aider le gouvernement à rétablir l’ordre public et fournir une assistance technique aux forces congolaises ; ainsi, l’entrée en jeu des Nations Unies et de l’Union Soviétique, internationalise l’affaire congolaise. Lumumba, figé pour avoir de la sympathie communiste devient l’ennemi de l’occident. Il est destitué par le Président Kasavubu après seulement, deux mois de fonction.

Comme si cela ne suffisait pas, le 08 août 1960, Albert Kalondji proclame la « naissance » de l’Etat autonome du Sud Kassaï. En septembre 1960, Antoine Gizenga proclame la République Populaire du Congo (RPC) avec comme capitale Stanley ville (actuelle Kisangani) ; cette république va être rapidement reconnue par une quinzaine de pays du bloc communiste.

C’est dans le contexte d’un vaste pays morcelé en de petites provinces coloniales, correspondant à des aspirations ethniques mais aussi au service de nouvelles autorités urbaines, elles-mêmes à la solde des occidentaux, que le gouvernement kinois mobilise les dernières forces armées (environ dix mille hommes), appuyées par des commandos belges et des troupes britanniques pour lancer des offensives successives contre la RPC en 1962 et, mettre terme à la sécession katangaise en 1963(63).

En 1964, une grande rébellion éclate dans l’ouest et gagne l’est du pays pour s’emparer de la province orientale du Kivu, du Maniema, du Sankuru, d’une partie de l’équateur et du nord Katanga. Le Congo est en pleine tourmente, les rébellions lumumbistes étant très actives sur les fronts est-ouest. Les casques bleus qui ont vu leur mission initiale s’élargir au maintien de l’intégrité territoriale et à l’indépendance politique du Congo, lancent une offensive contre les « gendarmes katangais » et mettent un terme à ces rebellions.

De retour au pays après un an d’exil, le 26 juin 1964, Tshombé reçoit mission de former un « gouvernement d’union nationale » ; celui qui hier était sécessionniste, a désormais mission de réunifier le pays car les occidentaux voient en lui le seul homme, qui puisse tenir tête aux velléités politiques de Lumumba et préserver la riche région du pays.

A la faveur d’un coup d’Etat, Mobutu prend le pouvoir en 1965. Pour les occidentaux, Il apparait comme l’homme de consensus tant interne qu’externe, capable de mettre en œuvre leur stratégie de mainmise sur cette riche région d’Afrique.

Six ans après son accession à l’indépendance, le Nigéria, ancienne colonie britannique sombre dans une guerre la plus médiatisée de l’Afrique(64). Par un coup d’Etat intervenu en juillet 1966, un Gouvernement Fédéral Militaire (GFM) est instauré à Lagos. A majorité musulmane, la junte confie la présidence de la république au chrétien, Général Yakubu Gowon qui a pour mission de restaurer la cohésion sociale et maintenir le pays dans un climat de paix. Dans la même période, les Ibos vivant dans le nord, subissent des persécutions de la part des haoussas ; environ trente mille des leurs sont assassinés. Dans le but d’apaiser la tension entre les communautés, le Président Yakubu, procède à la réorganisation administrative du territoire. Le Lieutenant Odumegwu Emeka Ojukwu, gouverneur militaire de la région de l’est trouve un prétexte et décide de la sécession de sa région avec la complicité du Conseil consultatif de la dite région; le 26 mai 1967, il proclame la République du Biafra. Le GFM réagit en mettant en place un blocus et en décrétant un état de siège sur le Biafra. Cette période qui dure cinq mois, marquée par la pénurie des produits avec des effets très négatifs sur la population ne fait que radicaliser la situation sur le théâtre des opérations.

Rappelons qu’à la veille de la sécession du Biafra, Lagos a rompu les relations diplomatiques avec Paris, protestant contre les essais nucléaires au Sahara. Indigné par l’attitude anti française affichée par Lagos, Paris décide de tout mettre en œuvre pour affaiblir le « géant d’Afrique de l’ouest ». A propos, le Général De Gaulle déclare à Foccart qu’il a nommé sur le dossier Biafra : « Il ne faut ni intervenir, ni donner l’impression d’avoir choisi. Mais il est préférable d’avoir un Nigéria morcelé qu’un Nigéria massif. Et par conséquent, Mon Dieu si le Biafra réussissait, ce ne serait pas une mauvaise chose pour nous ».

Pour joindre l’acte à la parole, Paris envoie de l’aide au mouvement biafrais : mercenaires, conseillers militaires ayant combattu en Algérie, au Congo, au Vietnam, pour entraîner les volontaires de la nouvelle armée du Biafra, des matériels militaires qui transitent par Libreville, laquelle capitale devient la plaque tournante de l’aide française au Biafra. De là, naît la coalition franco-hispano-lusophone, à laquelle se joints par la suite, l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Chine et Israël(65). Au nom de l’intégrité territoriale du Nigéria, la Grande Bretagne, les Etats Unis et l’Union Soviétique soutiennent le gouvernement nigérian.

En décembre 1969, c’est-à-dire après deux ans et demi de guerre et devant l’échec des pourparlers d’Addis Abeba, le GFM mobilise ses troupes, fortes de cent vingt mille hommes, encercle la république du Biafra et brise le mouvement sécessionniste. Le territoire de Biafra, riche en pétrole à propos duquel des puissances étrangères ont attisé une guerre fratricide, redevient partie intégrante du Nigéria. Si la guerre de Biafra est résolue par les armes, le sommet des chefs d’Etats de l’OUA(66), scelle la réconciliation du Nigéria avec les pays qui ont soutenu le Biafra. C’est aussi l’occasion de condamner les pays occidentaux qui ont fourni des armes à cet effet, et demander à ceux qui occupent une partie du territoire de se désengager.

La sécession du Biafra a ouvert la voie à certains pays occidentaux de se jeter dans la course au protectionnisme, en soutenant en coulisse le mouvement.

Pour la France, le rapprochement du Nigéria à l’Union Soviétique constitue une islamisation pro soviétique, menaçant de s’étendre aux pays voisins du Nigéria, ex colonies françaises. Mais aussi, le Biafra doit constituer une source énergétique à ne pas laisser à la portée d’une autre puissance, car riche en pétrole, lequel produit devient rare avec la perte de l’Algérie.

Considérée comme l’un des pays les plus pauvres au monde, la Somalie opte pour les actions militaires que pour le développement ; avec plus d’un milliard de dollars d’armes payés entre 1978 et 1985, ce pays de la corne de l’Afrique devient le client privilégié des producteurs d’armement russes(67).

Tous ces armements provenant des puissances occidentales, vont activer le virus des conflits armés de l’ère coloniale et, fraient le chemin à la propagation des armes à différents niveaux des pays africains, avec des conséquences énormes. En cinq décennies, le continent africain totalise plus de soixante dix coups d’Etats(68), accompagnés des conflits armés tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des territoires.

Les colonies lusophones que sont, l’Angola, le Mozambique, le Cap Vert, la Guinée Bissau, dans la confusion de la guerre froide, vont tour à tour, se lancer dans la guerre, dite d’indépendance. Ces pays, pour rompre avec le pays colonisateur, déclenchent des mouvements appelant à l’autonomie de leurs territoires. Durant plus de dix ans, ce conflit va être supplanté par la révolution des Œillets(69) au Portugal, qui cède la place à la guerre froide.

Sachant que l’Angola dispose d’énormes réserves en pétrole et en pierres précieuses, mais surtout proche du gisement de cuivre et divers minerais de Katanga, en territoire du Congo Belge, le gouvernement angolais qui porte les intérêts socialistes dans cette région, est devenu premier consommateur d’armes soviétique avec plus de 2,5 milliards de dollar en 1987. Pour contrer les actions du gouvernement angolais, et affaiblir leur adversaire soviétique dans cette partie de l’Afrique, les américains suscitent la naissance de l’Union Nationale pour l’Indépendance Totale de l’Angola (UNITA) (70). Ainsi, entre 1987 et 1991, l’aide accordée à l’UNITA par les Etats Unis a atteint cinquante millions de dollar en 1989.

La guerre de l’Angola qui a duré plus de vingt six ans, occasionnant plus de 500 000 morts et 3,500 millions de personnes déplacées, 86.000 handicapés du fait des mines anti personnels, traduit l’expression d’une rivalité causée par la guerre froide entre deux superpuissances, favorisée par des problèmes inhérents à l’Afrique. A propos, le journal New York Times déclare que la guerre en Angola est « un conflit tripartite ayant des bases tribales », dans lequel les combattants « se sont empêtrés dans la politique mondiale tandis que les superpuissances rivales et leurs agents se sont empressés de soutenir les factions qu’ils ont choisies ».

Quand bien même proclamé province d’outre mer par le Portugal en 1951, le Mozambique va profiter des contextes régional et international pour s’engager sur la voie de la décolonisation. C’est l’occasion pour toutes les couches sociales de ce pays, de se mobiliser pour réclamer l’indépendance. La naissance en juin 1962 du Front de Libération du Mozambique (FRELIMO) sonne le glas de la colonisation du Mozambique par le Portugal.

C’est par une action pacifique que le FRELIMO commence alors sa démarche pour l’accession du Mozambique à l’indépendance ; mais devant la tergiversation des pourparlers avec le Portugal, le FRELIMO déclenche la lutte armée à partir de 1964, soutenue par l’ensemble de la population. Très vite, le FRELIMO adopte la stratégie de guérilla et profitant des régions montagneuses, peu favorables aux troupes coloniales, il gagne du terrain et met la pression sur les troupes portugaises.

Pour briser ce mouvement, le Portugal envoie des moyens de lutte anti- insurrectionnelle, composés des troupes spécialement formées, aéroportées, avec mission d’obtenir le regroupement forcé des populations locales, afin de couper le FRELIMO de sa base. Après dix ans de bataille, le Mozambique accède à l’indépendance en 1975(71), au prix de plus 500 milles civils et 10 milles soldats mozambicains tués, 3.500 militaires portugais y ont également péri. La guerre de l’indépendance prenant fin, le Mozambique entre dans une phase infernale à l’instar de l’Angola ; c’est la guerre civile de 1977 à 1992, l’un des conflits intra étatiques de la période de la guerre froide.

Suite à la destruction du tissu socio-économiques du pays, conséquence de la guerre d’indépendance, la période de transition gérée par le FRELIMO est tumultueuse, caractérisée par des séries de tensions à travers le pays. Ce qui constitue le point d’appui de l’extérieur pour entrer dans un conflit à dimensions variables.

La Rhodésie et l’Afrique du Sud de l’apartheid, non seulement s’opposent à l’indépendance du Mozambique, mais reprochent au FRELIMO, son attitude tendant à stigmatiser l’apartheid et son rapprochement avec l’URSS. Pour Fragiliser les actions du jeune gouvernement de FRELIMO, avec les appuis des services secrets de la Rhodésie et militaires d’Afrique du Sud, et la bénédiction des Etats Unis, on assiste à la naissance de la Résistance Nationale du Mozambique(RENAMO), considérée comme mouvement de lutte contre le communisme. Pour mener sa lutte, la RENAMO adopte la même stratégie qu’a adoptée le FRELIMO lors de la guerre d’indépendance ; les enfants sont vite ciblés comme principaux combattants. Les actions menées par la RENAMO sont marquées par des violences, des destructions d’infrastructures du pays, des multiplications d’assassinats, exécutions sommaires et crimes de toutes sortes ; aucun des belligérants ne parvient à remporter la partie jusqu’à l’Accord de Paix Général de 1992, mettant terme à un conflit de plus de 15 ans, lequel a fait plus d’un million de morts et cinq millions de déplacés.

2.4.2. Les Conflits interétatiques

Les frontières issues de la colonisation, ont transmis aux sociétés africaines une nouvelle forme de structures sociales. Artificielles soient elles, ces frontières restent gravées.

En sortant des périodes noires de la colonisation, les africains se trouvent face à l’urgence de retrouver une légitimité immédiate. On va donc, assister à la naissance des crises de violence dues à une mutation des sociétés agraires vers une société moderne ; un groupe de nouvelles élites va naître et se réclame d’une nouvelle génération des dirigeants africains. Du point de vue politique, le départ précipité du colonisateur avec des tracés artificiels des frontières(72), ne va pas sans conséquence vu les incidents récurrents qui surgissent ; tel le conflit de Badmé opposant l’Éthiopie à l’Erythrée entre 1998-2000, celui de la Bande d’Ahouzou occupée par la Libye en 1973 et reconquise par le Tchad en 1987 ; le conflit qui opposa le Sénégal et la Mauritanie entre 1989-1992 à propos de la « région du fleuve » sans oublier celui de la bande d’Agacher qui opposa le Mali et le Burkina Faso, en 1974 ensuite en 1985 ou encore celui du Cameroun et du Nigeria qui se sont disputés la portion de Calabar dans le golfe de guinée connue sous le nom de la péninsule de Bakassi en 1994 et 1995.

Ces données historiques qui ne sont pas exhaustives prouvent à suffisance que, la colonisation a laissée sur son passage de lourds fardeaux tant culturels que structurels face auxquels les Etats africains doivent se mobiliser pour gérer.

L’Afrique a vécu et vit déchirée entre la « guerre tribale » et « paix coloniale ». Les conflits survenus au lendemain de l’indépendance et qui se poursuivent plus d’un demi siècle après, traduisent les séquelles d’une gouvernance violente de la période coloniale mais aussi la démonstration de l’expression des superpuissances qui ont affranchit l’esprit des hommes manipulables que sont les africains eux-mêmes(73).

55– La conférence de Yalta (URSS) s’est tenue du 4 au 11 février 1945 et a regroupé Roosevelt (Etats Unis), Churchill (Grande Bretagne), Staline (URSS). Le but est de régler les problèmes posés par la défaite proche des Allemands. http:// www.encyclopedie.fr/yalta
56- Histoire de la guerre froide : de l’Alliance aux deux blocs
http:// www.linternaute.com/histoire/guerre_froide_de l’alliance _ aux deux blocs
57- Le Plan Marshall pour reconstruire l’Europe, propose un programme d’aide destiné à la reconstruction de l’Europe après la seconde guerre mondiale. Refusé par l’URSS, accepté par les pays occidentaux, ce plan est élaboré le 05 juin 1947. www.m.grabarczyk.over-blog.fr
58- Sarah W. Freedman, Harvey M. Weinstein, Timothy Longman. L’Enseignement de l’histoire du Rwanda, approche participative pour les écoles secondaires du Rwanda. Ouvrage de référence pour l’enseignant. The Regents of the University of California, 2006.
59- Le Rwanda colonial. Portail d’information du Rwanda. http://.www.rwandagateway.org. -Apollinaire NTAMABYALIRO –Rwanda pour une réconciliation, la miséricorde chrétienne. Une analyse historico-théologique du magistère épiscopal rwandais (1952-1962). L’Harmattan, 2010.
60- La lettre pastorale publiée le 11 février 1959 s’intitule : « Super Omni Caritas, par-dessus tout, la charité.» http://www.musabyimana.net
61- Extrait du Manifeste des Bahutu, publié avec l’aide de l’Eglise catholique. Appui Rwanda Histoire d’un génocide 1885 -1999. http://www.appuirwanda.free.fr
62- Grands traités politiques. Acte général de la conférence de Berlin de 1885.26 février 1885. http://www.mjp.univ-perp.fr/traites1885berlin.htmL
63- Hilaire De Prince POKAM, repenser l’indépendance : la RD Congo 50 ans plus tard – Actes du colloque du cinquantenaire, Pole Institute, 2010, p. 75-92.
64- Il y a 40 ans, le premier drame humanitaire médiatisé se terminait : le Biafra
http:// www.agoravox.fr/tribune-libre/article/ il-y-a-40-ans-le-premier-drame
65- Letteron Philippe, La guerre du Biafra fut un échec, Conversations à propos de la guerre du Biafra, http://www.afrik.com
66- Ce sommet s’est tenu du 1er au 03 septembre 1970 à Addis Abeba. Cf. RFI-Union africaine l’OUA quarante ans après, www.rfi.fr
67- Adam Bernard, Les transferts d’armes vers les pays africains, GRIP, 20 oct.1997
68- Comment combattre les coups d’Etat en Afrique, expression achevée de la mal gouvernance ? http://www.bonnegouvernanceafrique.com
69- La Révolution des œillets, est un soulèvement politique qui apparaît comme un passage de la dictature à la démocratie au Portugal. L’insurrection déclenchée Le 25 avril 1974 par quelques jeunes officiers met terme à la dictature de Marcel Caetano, successeur d’Antonio de Oliveira Salazar. www.lusitanie.free.fr
70- Née en 1966, à l’issue de la lutte pour l’indépendance de l’Angola, l’UNITA est une force militaire se réclamant du socialisme démocratique et de la social-démocratie. Dirigée par Jonas Savimbi (décédé en 2002) avec le soutien des États-Unis, l’UNITA a combattu le régime de la République populaire d’Angola, soutenu par l’Union soviétique et le Cuba. Plus d’un quart de siècle de guerre (1975-2002). Cf. Histoire et conflits – Angola : le maquis de l’UNITA, vidéo Ina, 28’24’’, juin 1981. www.ina.fr/histoire-et-conflits/vidéo
71- Mozambique, encyclopédie universalis, http://www.universalis.fr
– L’indépendance du Mozambique et la guerre civile. www.voyagesphotomanu.com
72 – La Colonisation, les conflits armés et faillite de l’État Postcolonial : Exemple de la corne de l’Afrique MASHIMANGO- http://www. aboumashimango.over-blog.com
73- Blog géopolitique de Jacques SOPPELSA – La question des frontières en Afrique subsaharienne – Sept. 2009- www.géopol-soppelsa.over-slog.com

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