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2. Un cadre normatif pour l’ISR (IPSE p 115)

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Ce cadre s’appuie premièrement sur un corpus idéologique et une définition commune de l’ISR. Cette définition s’articule autour d’un objectif final dont dépendront le périmètre d’investissement et des principes communs à respecter. Nous réfléchirons ensuite autour d’un corpus technique permettant de garantir l’effectivité de la norme (fonctionnement, reporting et contrôle).

2.1 Une définition précise : épine dorsale du cadre normatif

Définition : l’ISR (IPSE) consiste à mener des actions en vue de responsabiliser les entreprises .Cette responsabilisation vise à améliorer leurs pratiques et à réduire leurs impacts négatifs en termes de gouvernance et de droits de l’homme.

Etant donné que les droits de l’homme sont souvent réduits par l’opinion, aux quatre conventions fondamentales de l’OIT, il nous semble utile de préciser ce que nous comprenons par droits de l’homme. Les droits de l’homme touchent quatre domaines fondamentaux :

– La protection et droits des travailleurs
– La protection et les droits des citoyens et des consommateurs
– Le droit à un environnement durablement vivable
– Le respect de la souveraineté nationale

Ces droits sont adossés aux textes internationaux cités ci-dessous :

– Principes directeurs de l’OCDE
– Pacte mondial
– Déclarations de l’OIT (tripartite et relative aux principes et droits fondamentaux
– Charte internationale des droits de l’homme
– Rapport final de John Ruggie (2010)
– Charte des droits fondamentaux de l’union européenne

Cette définition comporte non seulement l’objectif mais aussi les thèmes d’analyse que l’investisseur peut aborder. Contrairement à l’ISR responsabilité, l’investisseur n’est pas obligé de se référer à tous les droits et à toutes les violations citées par les chartes, car celui-ci, dans le cadre de ses actions n’en prendra que quelques-uns en compte.

Néanmoins il nous semble important de citer les critères pour donner un cadre d’action précis à l’ISR. La référence aux chartes internationales permet également de légitimer le processus.

Pour conclure cette définition, il nous semble que l’ISR n’est pas un terme adapté. D’abord, il ne répond pas à l’objectif final fixé dans la définition. En effet, un investissement socialement responsable voudrait dire que son processus garantirait le caractère responsable de l’investissement. Nos réflexions nous permettent de dire que cette ambition est démesurée et irréaliste. Cela signifierait que les actions menées dans chacune des sphères sociale, économique et environnementale auraient toujours des répercussions positives ou neutres sur les sphères restantes. Il est pourtant impossible de le prouver. Aujourd’hui, aucun indicateur ne permet d’ailleurs de combiner la sphère économique, sociale et environnementale(137).

Enfin, l’investissement responsable induirait que toutes les entreprises sélectionnées sont responsables, or nous savons désormais qu’on ne peut pas se référer uniquement aux impacts mais qu’il faut aussi prendre en compte les cas de complicité dans les violations des droits de l’homme.

Une autre critique est liée au mot « social », du reste très vague, et qui n’a pas été bien défini dans les critères qui lui sont associés. Se réfère-t-il aux critères ESG ? Dans ce cas, pourquoi employer l’adjectif social ?

Voici deux exemples de remplacement possibles :

– Investisseur responsable : ce terme a le mérite de se focaliser sur le comportement de l’investisseur et non sur le processus. C’est bien l’investisseur qui par son comportement peut se montrer responsable dans la prise en compte des sujets sociétaux. Néanmoins, cette expression ignore le fait que seule une minorité de fonds gérés par l’investisseur le sont de manière responsable. De plus, nous retrouvons un problème intrinsèque au mot responsabilité qui fait appel à un jugement moral forcément relatif.
– Investissement pour le progrès sociétal (des entreprises) : l’avantage de ce terme est de retirer l’adjectif responsable. Il est impossible de dire qu’un investissement et un investisseur sont responsables dans l’absolu. Les sociétés intégrées ne peuvent pas non plus être responsables dans leur globalité. Le mot progrès renvoie à une dynamique d’amélioration, ce qui correspond plus à l’objectif de la démarche que nous avons définie. Le mot sociétal est moins ambigu que le mot social (qui évoque plutôt les relations humaines), il affirme la responsabilité des investisseurs envers la société et ne veut pas dire qu’il prend en compte des critères sociétaux qui sont aussi flous que le terme social tant qu’il n’est pas défini.

Nous choisissons donc le terme investissement pour le progrès sociétal (IPS ou IPSE) qui nous semble plus clair et plus adapté à notre objectif. L’inclusion du mot entreprise limite le périmètre de l’investissement aux entreprises bien que des fonds obligataires soient ISR. Toujours est-il que la démarche d’engagement actionnarial ne semble pas adaptée aux états puisque ceux-ci devraient répondre de leurs actions devant leur peuple et non devant leurs créanciers, si ce n’est dans le remboursement de leur dette.

2.2 Principes inhérents à la définition de l’IPSE

2.2.1 La reconnaissance la responsabilité de l’actionnaire dans les impacts causés par les entreprises

Le FIR décrit pertinemment ce principe :

« Reconnaître que toute activité économique produit des effets dont l’investisseur porte une part de responsabilité. »

En somme, bien que l’investisseur reconnaisse que les entreprises sont utiles pour pourvoir les besoins de l’humanité, elles peuvent aussi être à l’origine d’actions servant leurs intérêts privés au détriment de leur écosystème.

2.2.2 L’IPSE est un investissement sur le long terme

L’interviewé 8 (analyste ISR) fait une remarque très pertinente concernant le lien entre la durée de détention des actions et l’intérêt des investisseurs pour les enjeux des entreprises.

« Il y a une règle du système qui fait qu’aujourd’hui, du fait de la rotation des portefeuilles, je pense notamment aux Etats-Unis, c’est un peu archétypal, la durée de détention était de 6 ans. Elle est passée à 6 mois ces dernières années et à 28 minutes si l’on inclut le High Frequency Trading. Evidemment, lorsque l’on a des gens qui ont des durées de détention des titres si courtes, on ne va pas forcément attendre d’eux qu’ils s’intéressent à l’entreprise, à ses impacts, à ses enjeux et s’attendre à ce qu’ils cherchent à influencer les entreprises. »

Quelle est la durée de détention des actifs en France ?

Quelle est la durée de détention des actifs en France

Source(138)

Le schéma ci-dessus est issu d’une étude de la banque de France sur la durée de détention des actions françaises selon le type d’acteurs. Il est intéressant de noter que ce sont les OPCVM (organisme de placement collectif en valeurs mobilières) qui ont la durée de détention la plus courte (1 an et 1 mois). Or les OPCVM sont les outils de base de la gestion collective pour les sociétés de gestion, ils comprennent les FCP (fonds communs de placement). Le second schéma corrobore cette observation puisque les agents non financiers détiennent des actions environ six ans tandis que les agents financiers gardent leurs actions moins de deux ans, soit un rapport de plus de trois.

Quel lien entre la durée de détention des actions et le rôle des actionnaires dans la responsabilité sociétale des entreprises ?

La durée de détention est partie intégrante d’une vision court-termiste qui semble prédominer aujourd’hui dans le monde financier. Plusieurs phénomènes sont à l’origine de cette rupture entre les entreprises et les actionnaires. Comme nous l’avons expliqué dans le premier chapitre, la nature de l’actionnaire a changé avec la montée en puissance des marchés, conjointement à la création d’un acteur intermédiaire : la société de gestion de portefeuille. La mise en concurrence de ces sociétés a incité les clients finaux à chercher une performance à court-terme(139).

Cette recherche s’est accompagnée d’une déconnexion de la réalité rendue possible par les nouvelles technologies de communication et des systèmes d’information, permettant de traiter des opérations avec d’autres actionnaires distants de milliers de kilomètres en quelques secondes. Cette dématérialisation s’est donc accompagnée d’une deshumanisation, l’entreprise devenant un « simple sous jacent d’un actif financier caractérisé par un couple (rendement/risque) indéfiniment substituable »(140).

Cette vision déconnectée de la réalité des entreprises et orientée vers une logique de profit de plus en plus rapide du fait de la concurrence, n’a été rendu possible que parce que l’actionnaire a aussi été totalement exempté de responsabilité lors de la promulgation de la loi de 1966 : « sur le plan juridique, la responsabilité limitée et anonyme a consisté en un complet transfert des responsabilités vers l’entreprise elle-même, ses managers et ses employés »(141).

Les auteurs de ce livre ajoutent que cela a poussé les actionnaires à se désintéresser de l’analyse fondamentale de l’entreprise au profit d’une analyse purement boursière (du titre de l’entreprise) puisque le risque financier « réel » a été considérablement amoindri. Nous reviendrons sur cette notion dans notre réflexion plus globale sur la place de l’actionnaire dans notre société.

Le court-termisme a été favorisé par d’autres évolutions que celle de la durée de détention comme la naissance de l’indicateur ROE (return on equity) qui est un taux de retour sur capitaux investis. Cet indicateur matérialise une exigence de rendement des capitaux de 15% par an en moyenne de la part des actionnaires(142) , poussant les dirigeants à adopter des stratégies de court terme au prix de licenciements et de délocalisations, augmentant ainsi les risques d’atteintes à l’environnement et de violations contre les droits de l’homme.

Un autre facteur réside dans l’apparition des comptes trimestriels qui incitent les entreprises à présenter une performance à court terme ou encore le high frequency trading qui permet de confier à des algorythmes mathématiques le soin de vendre et d’acheter des titres financiers en seulement quelques microsecondes.

En conclusion, la durée de détention des actions, bien qu’elle ne soit pas le seul facteur favorisant la responsabilisation des actionnaires est importante et aussi symbolique. La responsabilité des entreprises nécessite un jugement de long terme et nécessite que les actionnaires assument leur rôle de contre-pouvoir dans les entreprises. Des durées de détention de quelques jours à quelques mois n’incitent pas les investisseurs à s’intéresser aux enjeux de responsabilité sociétale des entreprises détenues. De plus, la RSE requiert, pour beaucoup de ses thématiques, une stratégie de long terme (principe de précaution, employabilité des salariés…).

La durée de détention moyenne des actions dans un portefeuille est spécifiée dans le prospectus d’un fonds par le taux de rotation. En voici une définition :
Le taux de rotation du portefeuille correspond à la somme des mouvements (achats et ventes de titres), diminuée du montant net des souscriptions/rachats, rapportée à l’actif net moyen constaté sur la période(143).

– Proposition : autoriser un taux de rotation faible pour les fonds ISR. La fixation du taux est discutable dans la mesure où le gérant doit pouvoir se délester des titres des entreprises pour lesquelles les démarches ont été infructueuses ou s’il veut assurer une gestion active de ses fonds.

2.2.3 L’IPSE et les produits dérivés

L’IPSE incite à repenser le rapport de l’actionnaire et de l’entreprise. Il cherche à sensibiliser l’actionnaire sur sa responsabilité vis-à-vis de l’entreprise. Cela nécessite de le rapprocher de la vie des entreprises et de leur réalité.

Les produits dérivés ont tendance à éloigner l’investisseur des entreprises, et ainsi, à les déresponsabiliser. Le but de l’IPSE est aussi de donner du sens à la fonction de l’investisseur dans la création de valeur ajoutée économique. Les produits dérivés n’ont qu’un lien limité dans la production de valeur ajoutée réelle. Bien qu’utiles à leur création (pour les personnes et les entreprises souhaitant se couvrir), ils se sont progressivement transformés en outils de spéculation favorisant les crises.

Les dérivés de crédits tels que les CDO (collateralised debt obligations) ont par exemple joué un rôle important dans la diffusion de la crise des subprimes au monde entier. Plusieurs investisseurs ont d’ailleurs poursuivi les banques pour la vente de ces produits très opaques et très complexes. Les CDS (credit default swaps) ont été accusés récemment de favoriser la spéculation contre les dettes souveraines en cela qu’ils ne nécessitent pas de porter le sous-jacent (obligation d’état), constituant ainsi une sorte d’assurance contre un risque qui ne peut pas atteindre l’investisseur. Cette pratique appelée « à nu » a d’ailleurs récemment été interdite par l’UE(144).

2.3 Le corpus normatif technique

2.3.1 Fonctionnement

2.3.1.1 L’engagement actionnarial comme outil de référence de l’IPS

Le seul moyen existant aujourd’hui pour l’actionnaire pour inciter les entreprises à améliorer leur comportement est celui de l’engagement actionnarial. Nous reprenons la définition de Novethic dans le cadre de ce point :

« L’engagement actionnarial désigne le fait pour un investisseur de prendre position sur des enjeux ESG et d’exiger des entreprises visées qu’elles améliorent leurs pratiques dans la durée. Ces exigences sont formulées via une démarche structurée comprenant un dialogue direct avec l’entreprise et un suivi dans le temps. L’investisseur peut utiliser plusieurs leviers de pression lorsque la démarche de dialogue s’avère infructueuse : une communication publique sur l’avancement du processus d’engagement et sur les insuffisances de l’entreprise dans le domaine extra-financier, un impact sur la gestion allant du gel de la position au désinvestissement, ainsi que l’exercice de ses droits d’actionnaire : questions en assemblée générale, refus des résolutions proposées, soutien ou dépôt de résolutions externes.(145) »

– Proposition : Les sociétés de gestion voulant mettre en place l’IPS doivent le traduire dans un processus d’engagement actionnarial pour bénéficier de la dénomination sus citée. Les autres techniques existantes peuvent continuer à être utilisées en complément de la démarche d’engagement (best in class…). Enfin, un nombre minimal d’initiatives à mener (terme qu’il faudrait par ailleurs définir) pourrait être donné en pourcentage des titres détenus dans le fonds.

2.3.1.2 L’engagement actionnarial et les critères d’action

L’avantage de l’IPS par rapport à l’ISR actuel réside dans le fait que l’investisseur n’a pas à évaluer tous les aspects de la responsabilité sociétale. Au contraire, il choisit certains sujets dans le cadre de ses démarches. Ceci permet de traiter en profondeur un sujet et d’organiser une action concrète afin d’améliorer le comportement d’une entreprise sur un enjeu précis. Cependant, la société de gestion peut considérer seulement les sujets les plus matériels ou se sentir concernée par un seul des piliers cités dans la définition. Le risque d’opportunisme pourrait être limité sans toutefois empêcher le gérant de traiter ses sujets de prédilection et nuire à la diversité des entreprises.

– Proposition : les sociétés de gestion et les investisseurs institutionnels (dans le cas d’une gestion interne) devront opérer des initiatives pour trois des quatre thèmes suivants :

– La protection et droits des travailleurs
– La protection et les droits des citoyens et des consommateurs
– Le droit à un environnement durablement vivable
– Le respect de la souveraineté nationale

Par ailleurs, les initiatives faites sur un thème ne peuvent dépasser 60% du total des initiatives.

2.3.1.3 A qui incombe la responsabilité de l’engagement ?

Un malentendu existe dans la définition de la responsabilité de l’engagement lorsque les fonds d’un investisseur institutionnel sont confiés à une société de gestion dans le cadre d’une gestion déléguée. Ce problème n’est pas anodin puisque la gestion déléguée par les institutionnels aux sociétés de gestion compte pour 22% des actifs ISR (14,8Mds d’euros(146)). Il peut d’ailleurs être pris comme argument dans le cas d’une gestion collective.

– Proposition : la responsabilité en termes d’engagement actionnarial incombe à la société de gestion quelque soit le type de gestion (déléguée, collective, fonds d’épargne salariale). Il convient à la société de gestion de faire des propositions claires de sa politique d’engagement dans sa réponse aux appels d’offre émanant des investisseurs institutionnels et des représentants des FCPE lorsque ceux-ci souhaitent déléguer la gestion de leurs fonds. La politique d’engagement sera présentée et signée par les particuliers dans le cadre d’une gestion collective ou d’une gestion sous mandat.

2.3.1.4 Le reporting

Une des conclusions de notre étude concernant l’engagement est celle de la faiblesse du reporting qui, souvent, n’est que thématique et descriptif. Les mesures de résultats sont souvent limitées à l’exercice de la politique de vote. La cause de la faiblesse du reporting repose en partie sur la difficulté de la mesure comme le souligne Novethic. Comment considérer la réussite d’un dialogue ? Sur quelle échelle de temps l’apprécier vu que le temps du dialogue est un temps long ? Enfin comment considère-t-on l’échec d’un dialogue ? Un refus de résolution ne signifie par exemple pas, la fin du processus, il peut au contraire attirer l’attention des médias sur l’entreprise et modifier le rapport de force entre l’actionnaire et l’entreprise.

– Proposition : Les acteurs de l’IPSE, agences de notation, sociétés de gestion, membres de la société civile, partenaires sociaux, représentants des consommateurs, et investisseurs institutionnels pourraient dans un premier temps se mettre d’accord sur des indicateurs de résultat. Le reporting peut intégrer quatre critères fondamentaux :

– Le nombre d’initiatives présentées ainsi que leur répartition selon les 4 thèmes des droits de l’homme.
– Les initiatives entreprises par entreprise
– Des mesures communes pour toutes les sociétés de gestion afin de pouvoir comparer les pratiques.
– Une mise à disposition publique à travers le site internet et une communication envoyée aux clients des fonds IPSE.

2.4 Le contrôle

Une norme sans contrôle comporte le risque de malhonnêteté de la part des sociétés voulant pratiquer l’IPS. D’autre part, le contrôle est un gage d’assurance pour les clients finaux. La légitimité conférée au processus est aussi un argument commercial pour l’investisseur IPS à condition que la norme soit connue de la population. Enfin, le processus de contrôle ouvre la porte à des dispositifs d’incitation fiscale pour promouvoir l’IPS.

. Qui contrôle aujourd’hui l’ISR?

Aujourd’hui, Novethic octroie un label ISR privé. Un autre label, le CIES se concentre sur l’épargne salariale. Les deux institutions ne considèrent pas les mêmes finalités pour l’ISR, Novethic se positionnant sur l’objectif final responsabilité et le CIES sur l’objectif final responsabilisation.
Cette profusion de labels comporte des désavantages :

– Elle nuit à la visibilité de l’ISR pour le public.
– Les labels manquent de légitimité : en l’absence d’une norme, ce sont des initiatives privées qui ont vu le jour. Ces labels n’intègrent que certains acteurs et reflètent une vision partiale de l’ISR et de la RSE. Par exemple, le CIES n’est composé que de syndicats et ne reflète que leurs intérêts. Il y a, en revanche, des raisons de penser que Novethic a une vision moins orientée dans la mesure où il n’est pas partie prenante des entreprises notées (Novethic est une filiale de la CDC).

D’autre part, le label de référence Novethic subit des critiques de la part de divers acteurs internes ou externe à l’ISR. Ainsi, Les Amis de la Terre considèrent que Novethic n’évalue pas tant la qualité du processus que sa transparence. Un analyste ISR rencontré au cours d’un entretien corrobore « ils jugent la transparence, pas la pertinence d’un processus ».

Ces critiques sont justifiées puisque Novethic juge quatre critères :

– Le fait d’intégrer une analyse ESG sur 90% du fonds.
– La transparence du processus.
– La lisibilité et la fréquence du reporting.
– La publication de la composition intégrale du portefeuille.

Aucun de ces critères ne permet d’exclure un fonds sur la base de la qualité de son processus. Cependant, Novethic se trouve confronté à une limite conceptuelle forte. Comment évaluer la qualité d’un fonds ISR responsabilité ? La réponse à cette question tend naturellement vers la comparaison des niveaux de responsabilité des fonds. Mais comment un fonds peut-il être jugé plus responsable qu’un autre ?

Une deuxième critique de Novethic est émise par un autre analyse ISR : « il y a un comité d’experts mais ce ne sont pas des gérants. Il faut un comité technique pour améliorer le label avec des gérants.» Ici, les compétences mêmes de l’équipe chargée du label sont remises en cause.

Enfin, il est important de noter que le contrôle s’effectue par des questionnaires échangés par e-mail.

Il convient donc dans le cadre d’un dispositif de contrôle d’éviter certains écueils :

– Le manque de légitimité du contrôleur.
– L’absence de compétence du contrôleur.
– Les failles dans l’évaluation de la « qualité » de la démarche.

– Proposition : dans le cadre d’une norme d’état, le contrôleur (ce n’est pas toujours le cas) peut être lié à l’état. Certaines personnes rencontrées ont pensé à l’AMF. Il est vrai que cette institution, pas très appréciée de la profession au demeurant, combine la légitimité de l’organisation publique et les compétences de contrôle.

Ces compétences peuvent s’exercer dans le cadre des missions suivantes :

– Contrôle du nombre minimum d’initiatives par fonds : le contrôleur vérifie les documents officiels transmis par les entreprises et le type d’initiatives retenues et qualifiées au préalable. Cela nécessite, nous l’avons dit, que les acteurs s’accordent sur la définition des initiatives possibles (envoi de courriers, dépôt de résolutions, question orale à l’assemblée…).
– Contrôle du reporting et de sa correspondance avec la réalité.

L’AMF n’a toutefois pas les compétences nécessaires pour évaluer la « qualité » du processus puisqu’il s’agit de déterminer quelles sont les démarches les plus pertinentes ou les plus efficaces en vue de l’obtention d’un changement de comportement de l’entreprise. Cette évaluation nécessite d’ailleurs un travail méthodologique important pour déterminer de manière précise les critères de qualité.

Deux cas sont possibles, la création d’un département de contrôle de l’IPSE spécialisé regroupant des experts de la finance et des « experts » de la RSE ou un contrôle bipartite avec Novethic qui travaille déjà sur les sujets de RSE.

137 Michel Capron, Françoise Quairel. op.cit. 2006 : “On trouve des juxtapositions d’évaluation de domaines (dans le cas par exemple des agences de notation extra-financière), mais pas de système d’évaluation permettant d’intégrer les trois dimensions et e fournir la mesure d’une performance globale)”
138 Banque de France. La détention des actions françaises cotées. Bulletin de la banque de France. 2000, 80, p. 93
139 Maurel, Olivier. op.cit 2009. p. 23
140 César de Brito, Jean-Philippe Desmartin, Valéry Lucas-Leclin, François Perrin. op.cit, p103
141 César de Brito, Jean-Philippe Desmartin, Valéry Lucas-Leclin, François Perrin. Ibid
142 Lordon,Fréderic.Enfinunemesurecontreladémesuredelafinance,leSLAM!www.mondediplomatique.fr.[Enligne]http://www.mondediplomatique.fr/200/02/LO14458.
143 Oddo Asset Management. Methodologie de calcul : Performances et Indicateurs de Risque. [pdf]
144 AFP.Spéculation:l’UEinterditles”CDSànu”.www.lefigaro.fr.[Enligne]18octobre2011.http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2011/10/18/97002-20111018FILWWW00690-speculation-l-ue-interdit-les-cds-a-nu.php.
145 Novethic. op.cit 2011.p6
146 Novethic. Ibid 2011.

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