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2. CAS PARTICULIER : L’AGENT GENERAL D’ASSURANCES

ADIAL

La question de l’extension de l’arrêt Costedoat à l’agent général d’assurances a fait l’objet d’une réflexion doctrinale (A) et finalement, la décision fut prise par la Première chambre civile de la Cour de Cassation dans un arrêt du 10 décembre 2002 (B).

A. REFLEXION AUTOURS DE L’APPLICATION DE LA JURISPRUDENCE COSTEDOAT A L’AGENT GENERAL D’ASSURANCES

Cette réflexion a été initiée par Monsieur Hubert GROUTEL qui, dans une chronique intitulée «La nouvelle jurisprudence relative à la responsabilité des préposés peut-elle influer sur celle de l’agent général d’assurances ?»25, a procédé sous forme de syllogisme pour tenter d’apporter une réponse à cette question qu’il qualifie de délicate mais d’indispensable. Dans la majeure de ce syllogisme, il rappelle la jurisprudence Costedoat qui énonce que «n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant». La mineure se fonde quant à elle sur l’article L511-1 alinéa 2 du Code des assurances qui dispose que les entreprises d’assurances sont civilement responsables, au sens de l’article 1384 du Code civil, des dommages causés par les mandataires, notamment l’agent général, agissant en cette qualité, lesquels sont considérés comme des préposés. On constate donc une assimilation entre le préposé de l’arrêt Costedoat et de l’article L511-1 alinéa 2 du Code des assurances. La conclusion à ce syllogisme apparaît alors avec évidence : il convient de se demander si les nouvelles règles issues de la jurisprudence Costedoat s’appliquent également à l’agent général qualifié expressément de «préposé» par le Code des assurances. La logique voudrait qu’en raison de cette assimilation, la réponse soit positive. Cependant, nous allons le constater, la jurisprudence Costedoat n’a pas vocation à s’appliquer à l’agent général.

B. LA SOLUTION DE L’ARRET DU 10 DECEMBRE 2002

En effet, la Première chambre civile de la Cour de Cassation a, dans un arrêt du 10 décembre 2002, énoncé que «Le renvoi fait par l’article L511-1 alinéa 2 du Code des assurances à l’article 1384 du Code civil a pour seul objet de faire bénéficier le client de l’agent général, pris en qualité de mandataire de l’assureur, de la garantie de ce dernier»26. Autrement dit, ce renvoi n’empêche pas que l’agent général d’assurances soit personnellement responsable des dommages qu’il cause à autrui dans le cadre de sa mission. Se pose alors immédiatement la question de savoir comment la Cour de Cassation a justifié sa solution (a). En effet, elle semble opérer une discrimination au détriment de l’agent général alors que ce dernier est considéré comme un préposé par le Code des assurances (b).

a. Justification de la solution

La justification de cet arrêt puise sa source dans le nouveau statut des agents généraux d’assurances de 1996, duquel il résulte que l’agent général d’assurances exerce une activité indépendante de distribution et de gestion des produits et des services d’assurance, ce en vertu d’un mandant qui le lie à une ou plusieurs entreprises d’assurances. Il agit en qualité de mandataire et conserve à ce titre une véritable autonomie d’action. Cette justification vient contredire la position d’Hubert GROUTEL qui, sans l’affirmer expressément, émet l’hypothèse d’une transposition de la jurisprudence Costedoat à l’agent général, notamment au motif que ce dernier demeure soumis au pouvoir de direction de l’entreprise d’assurances, ce qui devrait suffire à justifier cette transposition. Néanmoins, la grande majorité de la Doctrine, ainsi que l’Avocat Général JERRY SAINTE-ROSE, considèrent que ce pouvoir de direction n’est pas suffisant pour caractériser un véritable lien de subordination justifiant que l’entreprise d’assurance réponde des actes dommageables causés par l’agent général dans le cadre de sa mission, ce dernier conservant une véritable autonomie d’action. De même, il a été considéré que l’article L511-1 alinéa 2 du Code des assurances n’édictait que la responsabilité de l’entreprise d’assurance à l’exclusion de celle des agents généraux, malgré leur qualification de «préposés», de manière à ce que l’assureur soit considéré comme un commettant responsable des actes dommageables de son agent. Par conséquent, l’agent général demeure personnellement responsable des dommages qu’il commet dans le cadre de sa mission, «l’article 1384 du Code civil n’ayant pas été rédigé pour les agents d’assurances».

b. Conséquences de la solution

Deux principales conséquences ressortent de l’arrêt du 10 décembre 2002. Tout d’abord, la victime peut tout aussi bien agir contre l’assureur, pris en qualité de commettant, que contre l’agent général, quand bien même ce dernier n’aurait pas excédé les limites de sa mission. On applique ni plus ni moins la solution du régime antérieur par laquelle la responsabilité du commettant n’intervenait qu’à titre de garantie et se superposait seulement à celle du préposé, véritable débiteur de l’indemnisation.
Il en résulte donc que le commettant, lorsque sa responsabilité a été actionnée, dispose d’une action récursoire à l’encontre de l’agent général, le recours étant intégral sauf hypothèse où l’assureur aurait également commis une faute, auquel cas l’assiette du recours ne serait que partielle.

26 Cass. 1re civ., 10 déc. 2002 ; Juris-Data n°2002-016774
27 MM. Bigot et Langé, Traité du droit des assurances, t. 2, LGDJ, 1999, n°253.

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