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2-2 La juridictionnalisation de l’application des peines et le développement massif des aménagements de peine.

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2-2-1 La juridictionnalisation de l’application des peines

Avec la loi sur la présomption d’innocence du 15 juin 2000, la détention provisoire a été réformée et la libération conditionnelle et l’application des peines ont été modifiées en profondeur.

Cette loi a fait des différentes modalités d’application des peines, qui n’étaient jusque-là que des mesures d’administration judiciaire non susceptibles d’appel, des véritables décisions juridictionnelles prises après un débat contradictoire, au cours duquel le détenu peut se faire assister d’un avocat, et susceptibles d’appel devant la Chambre des appels correctionnels.

S’agissant plus particulièrement de la libération conditionnelle, le législateur a étendu la compétence du juge de l’application des peines qui peut désormais accorder cette mesure aux personnes condamnées à dix ans d’emprisonnement ou ayant une peine restant à subir inférieure à trois ans. Les demandes des autres détenus sont, elles, examinées par une juridiction régionale de la libération conditionnelle, présidée par un Président de Chambre ou un Conseiller de Cour d’appel et composée de deux juges de l’application des peines. L’intervention du Garde des Sceaux, compétent jusque-là à l’égard des détenus condamnés à plus de cinq ans d’emprisonnement, est supprimée. Les critères d’octroi de la libération conditionnelle ont été élargis.

Le décret du 30 décembre 2000, relatif à l’application des peines, a précisé les modalités d’application de ces dispositions, créant notamment la tenue des débats contradictoires au sein des établissements pénitentiaires.

La Loi Perben II du 9 mars 2004 portant sur l’adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité poursuit cette juridictionnalisation en introduisant dans le Code de procédure pénale un livre cinquième, intitulé « des procédures d’exécution », relatif à l’exécution des peines.

L’article 712-13 du nouveau code de procédure pénale précise que l’appel des jugements concernant l’Application des Peines est porté devant la Chambre de l’application des peines de la Cour d’appel, composée d’un président, de deux conseillers assesseurs, d’un responsable d’une association de réinsertion des condamnés et d’un responsable d’une association d’aide aux victimes. Au niveau de chaque Cour d’Appel, est ainsi créée une Chambre spécialisée dans le domaine de l’Application des Peines.

Cette loi a créé l’article 131-5-1 du Code de procédure pénale qui définit la mesure de stage de citoyenneté comme peine alternative à la prison : «Lorsqu’un délit est puni d’une peine d’emprisonnement, la juridiction peut, à la place de l’emprisonnement, prescrire que le condamné devra accomplir un stage de citoyenneté, dont les modalités, la durée et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’état et qui a pour objet de lui rappeler les valeurs républicaines de tolérance et de respect de la dignité humaine sur lesquelles est fondée la société. La juridiction précise si ce stage, dont le coût ne peut excéder celui des amendes contraventionnelles de la troisième classe, doit être effectué aux frais du condamné».

2-2-2 Le placement sous surveillance électronique, mesure phare des aménagements de peine depuis 2002

Les aménagements de peine les plus anciens sont la libération conditionnelle, créée en 1885 et la semi-liberté. L’article 65 de la Loi Pénitentiaire du 24 novembre 2009 consacre les aménagements de peine comme clé de voûte de la politique pénale d’exécution des peines.

Un rapport, remis le 23 avril 2003 au Ministère de la Justice par le Député Jean-Luc Warsmann, préconisait de redonner de la crédibilité et de l’effectivité aux sanctions non privatives de liberté considérant « qu’il est incontestable que les magistrats se détournent de ces mesures, n’ayant plus confiance dans leur application et préfèrent ainsi, en correctionnelle, recourir à la prison ferme plutôt qu’à un travail d’intérêt général ou un sursis avec mise à l’épreuve, dont l’application est défaillante»(18).

Depuis le 1er janvier 2002, les aménagements de peine ont progressé de 94,2%. Le nombre de placements sous surveillance électronique a quintuplé en 8 ans.
L’aménagement de peine actuellement le plus utilisé est donc le placement sous surveillance électronique.

Il s’agit d’une modalité d’aménagement de peine qui s’effectue au domicile de la personne placée, avec interdiction pour elle de s’en absenter pendant des plages horaires précisées par une ordonnance du Juge de l’application des peines ou bien du Juge d’instruction. Un bracelet est posé, généralement à la cheville de la personne condamnée, au sein de l’Établissement Pénitentiaire du ressort de la juridiction : il vaut pour écrou.

Un boîtier est installé au domicile de la personne qui envoie des informations au bracelet afin de le détecter à des horaires fixés par le Juge. La personne est ainsi tenue de rester à son domicile à des horaires précis. Toute violation de ces horaires peut entraîner une révocation de la mesure et une exécution de la peine en la forme ordinaire, c’est-à-dire en détention classique.

Depuis 2006, le nombre de placements sous surveillance électronique a doublé, passant de 5562 en 2006 à 11 259 en 2008.(19) Le PSE représente 40% des aménagements de peine actuellement.

Ce sont donc les SPIP qui absorbent et appliquent ces évolutions majeures que sont la pression médiatique et institutionnelle concernant les faits de récidive criminels, d’une part, et l’instruction et le suivi de nouvelles mesures concernant la surveillance électronique, d’autre part.

18 Rapport « Les peines alternatives à la détention, les modalités d’exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison : rapport de la mission parlementaire » auprès de Dominique Perben, Garde des sceaux, Ministre de la justice, confiée à Jean-Luc Warsmann, Député des Ardennes qui part du constat selon lequel les décisions de justice, au vu du fonctionnement de la chaîne pénale, ne sont généralement pas exécutées en temps réel. Ces délais d’exécution s’expliquent notamment par le manque d’informatisation du système judiciaire et rendent souvent l’application des peines inefficace, voire impossible. Pour remédier à cette situation, l’auteur présente 87 propositions regroupées autour de trois priorités d’action. Il s’agit tout d’abord de redonner de la crédibilité et de l’effectivité aux sanctions non privatives de liberté. Les courtes peines de prison doivent, quant à elles, être exécutées de manière juste et adaptée. Enfin, la troisième priorité est de réduire le nombre de sorties sèches de prison pour lutter contre la récidive.
19 Chiffres clés de l’Administration Pénitentiaire consultables au http://www.justice.gouv.fr/prison-et-reinsertion-10036/les-chiffres-clefs-10041/

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